Acteurs du cadre de vie, rénovons ensemble dans l’intérêt général !

23 avr 2021Édito

Logement, précarité énergétique… La crise sanitaire a été un révélateur des inégalités sociales et économiques sur le patrimoine bâti en France.

Pour y répondre, le Gouvernement a présenté « France Relance », près de 7 milliards d’euros investis sur la rénovation énergétique. Un Plan incluant 2 milliards pour le développement de MaPrimeRénov et 5 milliards dédiés à la rénovation énergétique des Etablissements publics et du Patrimoine.

Cette ambition politique se confirme avec le projet de loi Climat & Résilience qui entend interdire la location de « passoires thermiques » et geler les loyers d’ici 2028, si aucuns travaux ne sont entrepris par les propriétaires bailleurs.

L’Etat a donc dressé un cap : massifier les rénovations énergétiques du parc privé et social en sept ans.

Devant un tel projet prométhéen, chacun se positionne sur ce nouveau marché professionnel et économique de la rénovation, souvent au détriment de toute considération pour la conception, la qualité des ouvrages, leur pérennité et la conservation des spécificités patrimoniales.

Aborder la problématique de la rénovation énergétique sous le seul prisme technique, c'est oublier que la technique n'est qu'un aspect de l'architecture. 

C’est prendre le risque de se réveiller un beau matin de 2050 dans une Île-de-France botoxée au polystyrène, certes satisfaits d’avoir atteint les objectifs de la massification, mais atterrés de la piètre qualité des réalisations, de l’absence d'insertion dans le paysage, de la disparition de notre Patrimoine.
En oubliant l’essentiel : les désirs et les souhaits de bénéficier de plus d’espace, d’un logement adapté à toutes les étapes de la vie. Mais aussi et surtout en ayant omis le réchauffement climatique, ce qui nous aura conduit à de gros travaux qui n'auront pas pris en compte le confort d’été, par exemple.

Pour pallier ces écueils, l’Etat mettra naturellement en œuvre des moyens colossaux…  Il imaginera probablement une agence pour le renouvellement patrimonial. Il investira certainement dans un plan de relance pour un tourisme francilien devenu moribond. On réparera chaque maison, chaque immeuble, chaque école, chaque collège, chaque lycée, chaque mairie, chaque édifice. 
On se questionnera lors de colloques au sommet, convoquant les meilleurs experts. 
On cherchera avec fébrilité à connaitre l’origine de ces dysfonctionnements :
« Comment en sommes-nous arrivés là ? » ;
« Pourquoi aucune réflexion, plus contextuelle, fine et globale n’a été menée en amont ? » ;
« Pourquoi n’a-t-on pas profité de ces politiques pour embarquer d'autres travaux au bénéfice des habitants et des usagers ? »

« Pourquoi n’a-t-on tout simplement pas anticipé ? » Qui rétorquera que c'était là la consigne et qu'il n'y avait rien à comprendre, aura bien entendu raison.

Pourtant rappelons à l’Etat qu’il est le garant de l’intérêt général. Qu’il se doit de garantir que les processus mis en place concourent bien à l’atteinte des objectifs fixés dans les lois. En cela, la route aujourd’hui empruntée contrevient aux principes mêmes de la loi sur l’Architecture du 3 janvier 1977 et laisse les coudées franches à de nouveaux acteurs qui ne sont ni redevables devant la société, ni ne partagent tous des objectifs d'intérêt public. 

L’investissement économique de l’Etat, son positionnement sur ces enjeux sont une chance pour la Transition Ecologique. Mais tout cela ne doit pas se faire au détriment d’une vision stratégique de long terme. Les politiques publiques ne peuvent plus être des « coups ».

Elus, Maîtres d'ouvrage, Architectes, Ingénieurs, Entreprises, Energéticiens : œuvrons ensemble pour une action coordonnée, constructive et efficace des acteurs du cadre de vie, au bénéfice de l'ensemble de nos concitoyens.
Il est du devoir des pouvoirs publics d’organiser cette dynamique, avec pour seuls objectifs l'intérêt public et la garantie de la qualité de l’architecture et du cadre bâti. 

Fabien Gantois, Président de l'Ordre des architectes d'Île-de-France

Crédits photos : Pixabay - Creative Commons

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